Bienvenue à Ausrae Doc'

Tu dors, pas de doute là-dessus. Un bzz bzz bourdonne non loin de toi, cela ne te réveille pas plus que ça. Tu ignores pourquoi, mais le bruit ne te dérange pas. Non, ce qui te réveille c'est cette voix dans ta tête, celle-là même qui te balance :

« Bienvenue dans mon labyrinthe, j'espère que tu sauras en sortir. C'est un privilège que je te donne de l'essayer en premier. »

Tu ouvres tes yeux, te les frottes car ils collent encore un peu. Tu ignores où tu es, en tout cas tu sais que tu n'es pas dans ta chambre. D'ailleurs, où est ta chambre. Et surtout qui es-tu ? Tu sais que l'alcool et/ou la drogue peut donner des trous de mémoire, mais là, une chose est sûre c'est plus que ça, c'est l'amnésie. A moins que tu ne rêves. Enfin pourquoi rêverais-tu d'être au milieu des haies aussi haut que les murs d'une maison. L'air est humide et qu'est-ce qui fait ce bourdonnement. Cela ne fait qu'aggraver ton mal de tête. D'ailleurs tu aurais bien besoin de paracétamol. Tu trouves ça étrange de ne pas savoir ton nom, ton prénom, ton âge et autre information sur toi, mais tu connais le nom de cet antalgique. Tu te décides enfin à regarder la source de ce bruit. C'était une libellule rouge à la tête verte. Cet insecte était de taille immense, elle devait dépasser les 1 m. Tu ignores pourquoi, mais tu sais que cette espèce ne fut jamais répertoriée. C'était une Odonata Epiproctophora. Tu fus fier d'avoir fait une telle découverte, il en revenait donc à toi de lui trouver un nom. Tu n'as qu'à lui donner ton nom, c'est ce qui ce fait chez les scientifiques. C'est, d'ailleurs, ce que tu sembles êtres puisque tu portes une blouse blanche. Malheureusement, ton nom n'est pas dessus, ce serait trop simple. Il y avait juste le nom d'une école dont tu ignorais tout, était-ce la tienne ? Aucune idée. L'odonate ne cesse de voltigeait partout à une vitesse folle. Tu sembles voir de la fierté dans son regard. C'était bien le premier insecte à montrer un tel sentiment humain. Bon, tu lui trouvas alors le nom de Celeritodonata.

Bref, tu pouvais passer ton temps à la regarder, tu te sentais bien auprès d'elle, ta céphalée s'estompa même. Mais d'où venait cette odeur d'urine. Tu respiras l'air, avant de comprendre que cela venait d'en bas. Un animal avait peut-être uriné sur une de ses haies. À tes pieds, se trouvait un sac à dos. Tu t'en saisis, il pesait un certain poids. Tu fis donc ton curieux et regardas sa contenue. Il y avait un gros bouquin rose bonbon qui s'intitulait : Dictionnaire des Médicaments Vétérinaires et des produits de santé animale. Que faisait un tel bouquin ici ? Il y avait également un stéthoscope. Tu fis un lien : le livre, le stéthoscope et la blouse, tout cela devait être à toi, tu semblais être un docteur, un doc' comme on dit. Mais tu ne voyais pas le lien et l'utilité d'une sphère rouge et blanche, qui était le troisième objet dans ce sac. Pas le temps d'y réfléchir plus. Tu devais avancer. Tu pris le sac, tenta d'esquiver Odonata qui virevoltait de plus en plus près de ton visage.

Il n'y avait qu'une route, tu l'as pris donc, l'odeur d'urine te suivait. Tu compris alors que l'odeur venait de toi, de ton pantalon. Serait-il possible que tu te sois fait dessus lors de ton sommeil ? Il fallait que tu vérifies. Tu quittas alors ton pantalon et te mis à le sentir. Rien au niveau de l'entre-jambe, c'était sur le bas des pattes, on t'avait donc plutôt pissé dessus. Rassuré, tu voulus le remettre. Or un puissant bzz accompagné d'une fusée rouge s'en empara. Odonata t'avait suivi et avait décidé de prendre ton futal. Elle se stoppa, tu étais persuadé qu'elle t'observait et qu'elle te lançait le défi de la rattraper. Tu sautas alors pour saisir ton froc, mais trop juste, elle prit la fuite rapidement. Te voilà donc à courir après un drôle d'insecte inconnu, dans un endroit inconnu et humide, en boxer noir moulant (avec un T-shirt et une blouse blanche en plus). Au bout de quelque moment, tu rattrapas la voleuse insectoïde, elle t'attendait à un carrefour. Elle laissa tomber le vêtement dans une flaque de boue. Tu t'en saisis, le secoua pour enlever le plus possible de boue envie de le renfiler. Il était humide et tu n'étais pas sûr que le garder ainsi soit une bonne idée. Tu l'enlevas de nouveau, le mis sur l'épaule en attendant qu'il sèche avant de le remettre. La libellule géante volait au-dessus de ta tête, elle semblait surexcitée par ce défi qui se présentait devant vous deux : où allez ? Droit devant ? À gauche ? À droite ? Ou revenir sur ses pas .

Alors où devrais-tu aller ? Celeritodonata a choisi en tout cas en ce qui la concerne. Elle s'élève dans les airs, et comme par enchantement, les haies montent. La libellule continue à voler de plus en plus haut, elle ne voulait rien lâcher, mais les haies montaient avec elle. Si bien, que l'insecte ne put que descendre et revenir qu'à ton niveau. Dans ses yeux, tu pouvais voir de la déception, c'est à ce moment qu'une bourrasque passa près de ton visage, le vent était accompagné d'une voix féminine et céleste :

« Vous ne pouvez pas en sortir en trichant. »

Tu la reconnais, c'était la même voix qui t'avait annoncé l'honneur de te retrouver ici. Cartésien, tu penses que le manque de sommeil de fait un peu délirer. Tu tentes alors de réconforter la libellule géante en lui disant :

« Ne t'en fais pas. On va s'en sortir tous les deux. »

Étrange, tu es persuadé qu'elle acquiesce. Or cela ne te dit pas quelle direction prendre. La voie des airs n'est pas la bonne. Apparemment c'était triché.

« Et si on coupait à travers »

Tu t'approchas des haies, commença à mettre ton bras dedans mais l'en ressortis rapidement en réflexe. Tu venais de te faire sauvagement et violemment griffer. Tu ne l'avais pas vu, mais les haies étaient remplies de ronces. La manche était déchirée, tu regardas les dégâts et vis qu'avec les griffures jeunes, il y avait d'autres cicatrices, d'autres griffures, plus anciennes, qui semblaient être animales. Mais putain qui étais-tu ?

Résumons donc, impossible de prendre la voie des airs, impossible de couper à travers. Pas le choix, il fallait prendre une décision. Cela ne sert à rien de retourner sur tes pas, puisque c'est la première intersection que tu trouves. Donc soit continuer tout droit, aller à droite ou à gauche. Toujours en boxer, ton pantalon sur l'épaule, tu choisis, au hasard tu dois bien avouer, d'aller à droite.

« Allez Celeritodonata, on va par là. »

Tu commenças donc à prendre la nouvelle direction. Tu espérais que la libellule te suive, tu ne voulais pas la laisser seule dans cet endroit bizarre. Elle était peut-être la seule de son espèce, il fallait donc la protéger. Or tu ne l'entendis pas te suivre, tu décides alors de te retourner pour voir ce qu'elle faisait. Tu la vis au loin, voler dans la direction opposée. Pas le choix, tu devais la suivre alors. Tu fis donc demi-tour pour la rejoindre. Une fois en dessous d'elle, elle te regarda et sembla sourire, fière que tu sois obligé de la suivre. Elle fit alors un drôle de bruit : Bzz Bzz Bzz … Bzz Bzz … Bzz. Puis elle partit à toute vitesse. Pas le choix, tu la suivis à son rythme. Parfois, elle semblait ralentir juste pour que tu la rattrapes, pour mieux accélérer par la suite. Elle n'essayait donc pas de te semer, mais elle faisait la course et te narguer.

Tu n'étais pas essoufflé de ta course folle contre l'insecte. Apparemment tu semblais sportif. Alors, voyons voir ce que tu sais dorénavant sur toi : tu es sportif, couvert de griffures, tu possèdes un pantalon puant la pisse. Tu sembles être médecin au vu du stéthoscope que tu possèdes, mais le livre qui l'accompagne t’indique que tu serais dans le soin vétérinaire. Cela expliquerait que tu connaisses les noms des espèces de libellules. Enfin, cela n'est que spéculation puisque ton amnésie t'empêche de savoir si cela est bien vrai. Bref, tu retrouves Celeritodonata au bout d'un … cul-de-sac. Oui vous avez fait tout ça pour rien. Pas le choix, il fallait rebrousser chemin jusqu'au carrefour. La déception se lisait sur les yeux insectoïdes de la libellule, mais en même temps elle semblait fière d'avoir été la première arrivée. Après tout, elle fut celle qui remporta cette course improvisée qu'elle avait décidée seule.

Votre pantalon sec, tu le renfiles. C'est en le remettant que tu te rendis compte qu'il faisait frais. Tu ignorais l'heure qu'il était, ni à quelle date on n'était. Ton pantalon était crade mais sec et chaud et c'était le principal.

« Bon tu vois qu'il fallait prendre à droite. »

L'insecte ne sembla pas entendre, elle devait faire la sourde oreille. C'est donc déçue et obligée qu'elle te suivit. Le retour te sembla interminable, après tout tu le faisais en marchant, non plus en courant. C'est à ce moment que tu remarquas que les haies se ressemblaient toutes, aucun moyen de les distinguer. Au bout d'un moment, tu arrivas de nouveau à l'intersection. Si tes souvenirs sont bons, le chemin qui mène où tu t'es réveillé se trouve à ta droite à présent. Précédemment tu voulais aller à droite, mais tu suivis la drôle de créature qui avait pris à gauche. Conclusion, le chemin que tu voulais prendre se trouve en face. Or comme la première fois, ton compagnon de mésaventure décida de tourner à gauche une nouvelle fois. Soit le chemin qui faisait face au chemin qui te mène à ton point de départ. Pas facile à suivre, mais un plan dans ta tête te permet de mieux te repérer. C'est donc encore une fois, que tu te retrouvas contraint de suivre cet être volant. Ton amour des bêtes te perdra. Cette fois-ci pas de course, elle préféra te montrer ses prouesses aériennes. Si tu l'ignorais ou ne la félicitais pas, elle te rappelait à l'ordre en te chargeant dessus, et cela ne faisait pas du bien. Au vu de sa force, tu te demandes si finalement, elle ne pourrait pas s'en sortir seul et que tu aurais dû, par conséquent, prendre le chemin que tu souhaitais.